Iwak c’est Inktober with a keyboard, donc tout le mois d’octobre : un article par jour avec un thème précis.
Le mardi soir, j’allais régulièrement dormir chez ma grand-mère quand j’étais minot, car elle me gardait avec mon frère le mercredi, et parfois mes cousines. Ce sont de merveilleux souvenirs, car on regardait la dernière séance le soir, présentée par Eddy Mitchell, et c’était en semaine mais comme on ne travaillait pas le lendemain, on pouvait regarder le film avec elle1. Et parfois, on faisait « soirée cinéma », c’est-à-dire que ma grand-mère nous préparait des frites (à la main bien sûr) et qu’elle confectionnait également des cornets de papier pour qu’on les mange avec les doigts (!!) en regardant la télévision. Ah ça, croyez-moi c’était la belle vie, et une grand-mère très cool.
Typiquement les films de capes et d’épées étaient propices à une « soirée cinéma », et j’aimais énormément les films avec Jean Marais, notamment Le Bossu et Le Capitan de André Hunebelle (et aussi les Fantomas qui sont de lui aussi, dans un autre genre). Il s’agissait de films vraiment classiques et populaires des années 60, mais qu’on regardait encore avec beaucoup de plaisirs dans les années 80, et que souvent nos parents avaient eux-mêmes vu enfants au cinéma.
J’étais fasciné par l’incarnation de Jean Marais quand il faisait le Bossu et qu’il couinait un « Voulez-vous toucher ma bosse mon seigneuuuuuur ? ». Mais l’autre scène qui m’est resté, c’est dans Le Capitan qui est un redoutable film d’actions et d’époque, avec Jean Marais qui escalade la tour d’un château pour aller libérer sa belle avec seulement l’aide de deux poignards, qu’il insère entre deux pierres pour s’en servir d’appui. Tout le monde savait et rappelait que Jean Marais n’était jamais doublé pour ses cascades, et qu’on voyait là une véritable prouesse.
Et c’est assez dingue, car Jean Marais était vraiment l’incarnation du beau mec par excellence, courageux et fougueux, impétueux et téméraire, le bourreau des cœurs qui manie l’épée avec génie, qui déjoue les plans des méchants et sauve sa meuf à la fin de tous ses films. Mais il finissait ses films uniquement joue contre joue avec ses héroïnes, et ça m’a toujours marqué. Je ne comprenais pas trop les sous-entendus rigolards de mon père à l’époque bien sûr. Mais plus tard on m’expliquera que Jean Marais était loin d’être un homme à femmes, et il était de notoriété publique qu’il avait été l’amant et l’amour de Jean Cocteau. Tout cela était tacite, mais incroyablement su et étrangement accepté sinon intégré dans une mythologie parallèle.
Plus tard en effet, j’ai trouvé que Jean Marais était parfaitement pédé dans son attitude dans absolument tous ses films, et ça paraît dingue que tout le monde ait fait semblant de ne rien voir pendant tant d’années.
- C’est d’ailleurs le mardi 19 octobre 1982 qu’on a vu en relief le fameux film d’épouvante « L’étrange créature du lac noir » dans cette émission (on trouvait les lunettes bleu et rouge dans le Télé 7 jours de la semaine). ↩︎
Fan de Jean Marais et du Bossu aussi ! Pour le Capitan, j’avais moins aimé car l’intrigue prenait trop de liberté avec le roman de Zévaco que j’avais adoré. A propos de la scène d’escalade à mains nues et poignards, j’avais lu il y a fort longtemps qu’il y avait eu trucage : Jean Marais simule la grimpe sur un décor horizontal. Pardon de te mettre le doute mais la notice Wikipedia décrit une véritable escalade assez épique d’ailleurs puisqu’un poignard s’est cassé
Bah oui tu m’inquiètes là !!! Notre Jean Marais national était vachement connu pour ça non ?
Si si, il l’était mais là quand même le défi était énorme ! Je serai curieux d’avoir l’avis in situ d’un grimpeur en libre. Et si on nous servait une belle légende contemporaine ? Je ne crois pas que le doute nuira à la réputation de notre Jean adulé !
Je ne veux même pas te suivre en imagination dans ces balivernes !!
On se retrouve au château de Val et on va tester le truc ?
En attendant je continue l’enquête, il doit bien y avoir des survivants !