J’ai toujours été passionné par l’épistémologie, et surtout par les récits circonstanciés qui ont amené nos génies de la science à découvrir des notions de physiques ou de mathématiques avec presque rien, sinon beaucoup d’imagination, d’intuition et d’intelligence (du latin « intellegere » qui veut dire « comprendre »). Dans ce cadre, j’avais déjà auparavant dévoré les hors-séries qui évoquaient Evariste Galois, Gauss ou Pascal. C’est extraordinaire de découvrir leur personnalité et de les resituer dans un milieu historique, social, intellectuel, culturel et scientifique, de réussir à comprendre la manière dont ils ont pu révolutionner leur petit cercle de scientifiques nantis et parfois à bouleverser certaines visions du monde. C’est drôle aussi de constater comme les outils mathématiques ont aidé les physiciens ou réciproquement, comme certaines méthodes utilisées pour une science ont, en fait, permis l’émergence de nouvelles solutions de calcul dans des domaines complètement autres. Et puis, je reste fasciné par ces hommes aux talents multiples, par ces scientifiques touche-à-tout qui passaient des mathématiques, à la chimie en passant par l’astronomie ou la botanique, et la plupart du temps la philosophie et la théologie.
Ce magazine fait donc la part belle à un personnage qui m’a fasciné depuis des années. En fait, c’est précis, depuis la classe de troisième où mon prof de physique nous a expliqué l’existence de la gravité et de cette relation simple qui lie deux corps de masse m et m’ distant de r. L’intensité de la force d’attraction entre les deux corps est proportionnel au produit des masses et inversement proportionnel au carré de la distance qui les sépare. Il écrivit alors la formule au tableau : F = G mm’/r². Et puis nous commençâmes à appliquer cela à la Terre, et j’appris alors qu’un corps de masse m était soumis à une force P, telle que P=mg où g représente la gravité (à peu près constante sur la Terre). P s’exprime en Newton, du nom de celui qui en a prouvé l’existence et a réussi à quantifier ces relations. Outre cela, pour les plus grandes découvertes de ce génie de la science on peut facilement les relier à nos propres connaissances (plus ou moins lointaines ou en ruine) puisque ses plus grandes découvertes sont tellement capitales et fondatrices qu’on les apprend au plus tard au lycée. Et puis, on découvre aussi qu’il est un des premiers à avoir la première intuition valide et sagace sur la nature de la lumière ainsi que les phénomènes optiques tels les rais du spectre à travers un prisme et la diffraction.
Newton (1642-1727) est un être bien complexe, aussi bien décrié qu’adulé par ses contemporains, et une figure contrastée à bien des égards. En effet, il a même été salué et défendu par Voltaire en personne dans les « Eléments de la Philosophie de Neuton », tandis qu’à une période de sa vie, il a versé dans l’alchimie et les thèses ésotériques les plus hétéroclites. Il est aussi un des derniers scientifiques de renom qui tente, tant bien que mal, de chercher une continuité entre la théologie et ses études, mais aussi de conserver les techniques de conceptualisation des Anciens. Ainsi, le physicien explique tous ses résultats sous forme de démonstrations géométriques qu’il met par écrit, sans recours aux méthodes algébriques modernes. Pourtant, pour établir sa théorie de la gravitation, il découvre de nouveaux outils d’analyse tels que le calcul infinitésimal, mais il cherche absolument à trouver à posteriori une solution géométrique conforme aux mathématiques des Anciens.
J’aime beaucoup de genre de magazine aussi pour les démonstrations qui expliquent l’intuition du scientifique qui a donné lieu à certains axiomes ou théorèmes qu’on a appris au lycée. Là notamment, on y trouve la genèse (en parallèle avec Leibniz) du calcul infinitésimal, intégral et différentiel… Et Newton me fait aussi halluciner sur une chose, comme beaucoup de génies, il a eu l’intuition de quasiment toutes ses découvertes en 1665, à l’âge de 23 ans, alors qu’il était isolé dans une ferme en dehors de Londres à cause de la peste !
Ce que je trouve tout particulièrement hallucinant, c’est que la mécanique newtonienne, et l’optique du même nom, bien que fausses (parce que les corps n’obéissent plus aux mêmes lois dans l’infiniement petit, parce que la lumière suit une trajectoire courbe dans des espaces tordus par la gravité etc..), ces théories donc sont toujours enseignées en collège et lycée, parce qu’elles continuent d’expliquer tout pour la masse que nous sommes, ignorante de l’infiniement grand ou petit.
C’est un peu comme les quatres opérations en primaire, avant de t’expliquer les espaces vectoriels en prépa. (sauf que l’addition est toujours « vraie »).
Je pense en plus que ca va rester encore pareil pendant un bout de temps, tant les théories qui sont venues après Newton sont complexes et « abstraites ».
Et bien c’est tout de même normal de commencer par Newton, puis de poursuivre par Einstein qui a tout cassé la belle théorie du « tout en un » ! Parce que, en effet, ce serait beaucoup en demander… :mrgreen:
Ce que Newton a trouvé n’est pas faux. Nous nous en servons à tous les jours. Dans le monde « normal », les principes newtoniens fonctionnent et permettent même d’envoyer des sondes sur Mars. Il est donc normal de commencer par le normal, pour ensuite aller dans le « para »-normal. La science sert à ordonner le monde, et, tout dépendant du contexte, un certain ordre peut fonctionner. Il est alors valide. La théorie quantique offre une autre explication, et la beauté des mathématiques est que cette science a forcé, induit la découverte. Qui eût cru que la science finirait par parler de « principe d’incertitude? » Il est fort à parier que ce nouvel ordre du monde sera remplacé par un autre ordre dans les années à venir.
J’aime bien la petite histoire des sciences, qui nous explique que Newton aurait cru être plus célèbre par ses écrits philosophiques que par ses découvertes fondamentales en mécanique…
Sinon, au niveau scientifique, on ne peut pa se permettre de tout expliquer directement à partir de a théorie quantique, par exemple; je vois mal un prof de terminale expliquer l’équation de Boltzman pour en arriver, finalement à la loi de la gravitation universelle.
Je vois l’enseignement des sciences, du point de vue epistémologique : ce qu’on n’apprend pas aux élèves, c’est la notion d’échelle ; une loi telle que la gravitation universelle est « vraie » à notre échelle, fausse dans l’infiniment petit, imprécise dans l’infiniment grand… Je vois ça d’un oeil assez extérieur, un peu comme Notal qui a été mon prof à un moment, comem une notion de théorie fractale de la mécanique : les principes généraux peuvent se conserver à partir du moment où on change les outils et leur définition de précision.
J’vais peut-être m’arrêter là moi…
Ou peut-être n’explique-t’on pas assez les hypothèses que l’on prends pour utiliser/valider telle théorie. Un peu comme en maths où on n’aborde la notion d’axiome que bcp plus tard.
A lire de toute urgence à propos de Newton le roman « quicksilver » de Neal Stephenson qui met Newton en scène tout au long de sa carrière. « je cherche Dieu là où la géométrie me fait défaut »