Quand j’étais petit, j’étais un gentil petit garçon. Sympa avec mes parents, souffre-douleur de mon frangin, mais connu pour être vraiment un p’tit gars cool. On disait à mes parents que je m’endurcirai avec le temps, et qu’il le faudrait en tout cas. En mode : il ne faut pas se faire marcher sur les pieds, bla bla bla… Bah adolescent, j’étais toujours gentil. Les gens, les personnes avec qui j’étais en classe, les profs, la famille, tout le monde disait « Mathieu il est vraiment gentil, poli, respectueux et adorable. »
Mais on ajoutait que ça ne durerait pas, que mes parents allaient forcément vivre un enfer sur terre dans pas longtemps, avec une bonne crise d’ado (c’est sûr que mon frangin à 15 ans était en garde à vue, alors la barre était haute ). Mais j’attends encore ma crise d’ado, même si j’ai changé évidemment. Mais les amis plus tard, au lycée, dans les études supérieures, puis ceux de Paris, comme disait ma mère1, ont dit « Mathieu, c’est un mec trop gentil. »
Les gens rajoutent ce « trop » superlatif qui est une manière de parler, ou qui indique vraiment peut-être que c’est une disposition anormalement emphatique. J’ai voulu changer pourtant. A plusieurs reprises, je me suis dit merde il faut que j’essaie d’être méchant !! Mais je n’ai jamais réussi. Alors ça doit aussi être un truc un peu maladif et névrotique (qu’est-ce qui ne l’est pas), j’imagine que j’ai besoin qu’on me « trouve gentil » en réalité. Mais force est de constater que je vis très bien avec ça.
Je ne fais même pas d’effort. C’est juste comme ça. J’aime bien les gens, globalement.
Alors après, je me fais niquer parfois. Notamment en restant gentil avec des boulets insupportables qui me gâchent la vie pendant des années. Mais c’est la ma vie. Hu hu hu.
On me qualifie aussi souvent de « La Suisse », et ce n’est pas tant que je fuis les conflits, mais c’est vrai que je suis souvent neutre, ou tout du moins tempéré, pesant le pour et le contre, et essayant toujours de comprendre les opinions des uns et des autres, même lorsque c’est contraire à mon propre système de valeurs. En cela d’ailleurs, je sais que je peux avoir un peu la tendance macronienne insupportable du « en même temps », et je reconnais que je prône en tout cas toujours l’empathie et la compréhension fine du prisme et de manière dont les opinions peuvent se former chez mes contradicteurs. Je trouve que c’est toujours important de bien avoir cela en tête, et que parfois c’est aussi notre cadre de valeurs qui met le bordel.
Il y a aussi un peu de Marc-Aurèle là-dedans, avec une recherche de ce sur quoi je peux agir, qui m’intéresse grandement, et ce qui m’échappe et donc auquel je renonce aisément, étant toujours en quête de mon ataraxie personnelle. J’avoue aussi ne pas souvent rencontrer de personne qui partage ces valeurs là ou cette méthode. Et ça me frustre beaucoup et souvent, car j’ai l’impression de faire un effort pour aller vers l’autre, jusqu’à comprendre, mais pas forcément valider, un raisonnement spécieux pour moi car élaboré sur des postulats très différents des miens. Et quand l’autre ne fait pas le même effort, je trouve que ce n’est pas très respectueux et… gentil. On y revient.
Aujourd’hui avec la polarisation des opinions, la tempérance et la gentillesse ont complètement disparu. D’abord de nos espaces virtuels, puis de notre champ du réel, ce qui est tellement grave et triste. Et donc, ça m’affole de ne voir que des diatribes contre des diatribes, avec des deux côtés des raisonnements viciés. Alors évidemment celui qui est dans mon cadre de valeurs est plus facile à adouber, mais je n’ai vraiment plus de respect pour ces penseurs à la petite semaine, rhéteurs de pacotille et sicaires de réseaux sociaux.
Après, je vois bien qu’on ne fera pas grand chose avec des tièdes comme moi, et qu’il faut aussi avoir un mélange avec des personnalités un peu plus tranchées. Mais je ne supporte pas ces assertions hypocrites qui laissent de côté tous les défauts de leur réflexion. Moi quand je m’exprime, je défends toujours mon point de vue avec ses qualités, et j’expose aussi les limites et parfois les défauts même de ma pensée. Je trouve que c’est le seul moyen d’être honnête, et d’avancer réellement en collaboration. Je trouve que ça rend non seulement crédible, mais aussi que ça donne le droit d’émettre des critiques équilibrées et sincères, pas juste de pisser à la raie du connard d’en face. Hu hu.
Bisounours je suis, bisounours je reste donc.
- C’était pour les nouveaux ami·e·s pédés et lesbiennes évidemment, qui n’étaient jamais autrement qualifiés par pudeur, comme si la parisianité était suffisante pour les considérer parfaitement interlopes. ↩︎
De ce que je connais de toi , je confirme que tu es « gentil ».
Gentil, mais pas faible. Gentil mais pas mièvre. Gentil mais pas inconsistant. Un vrai gentil dont la fréquentation enrichit, apaise et rassure ceux qui le côtoient…
Et je le pense vraiment !
Te bile pas, je sais bien que je suis pas un gros naze.
On t’aime comme tu es Matoo, et si parfois tes boulets deviennent les nôtres, on ne t’en veut pas ;-)
Vive les bisounours!
Mouahahahah. Tu vois au moins très factuellement de quoi je parle.
Moi aussi je suis une « gentille » mais en réalité je ne le suis pas. Ca fait tellement d’année que je fais des efforts pour être gentille avec tout le monde que c’est devenu presque naturel, mais parfois (heureusement rarement), la méchanceté ressort et vlan, je suis super méchante (avec quelqu’un qui ne l’a pas nécessairement mérité, c’était juste la goutte d’eau). Heureusement qu’il reste encore quelques vrais gentils comme toi
Haaaaaan t’es une meuf normale en fait !! Bouuuuuuh.
On sait jamais : tu pourras devenir la terreur de l’EPAHD
Mais c’est important que quelques uns gardent le sens de la mesure, voient les avantages et les inconvénients.
Tu as raison, il faut garder espoir. Je me vois plutôt en tatie Danièle sur la fin, c’est vrai.
et un bisounours de +. Idem de mon côté et je compte l’être encore très, très, très longtemps.
À force de toute façon, on ne sait plus faire autrement. Et c’est compliqué d’apprendre de nouvelles choses.
Vive les bisounours !
Et puis il en faut bien sur Terre !
L’important est que tu te sentes bien en tant que bisounours.
En tout cas, je me sens moins seul maintenant
Ah mais oui je suis bien à mon aise.
Même quand tu te fais niquer par des boulets, ce n’est certainement pas de ta faute. Ne t’excuse pas d’être de bonne composition, et plus généralement d’être qui tu es. Tu ne seras pas plus heureux en étant quelqu’un d’autre. Crois-moi, j’ai essayé. ;)
Oh oui, j’ai passé l’âge des grandes transformations je crois. Il faudra faire avec !!!
« Un truc maladif et névrotique » qui peut s’appliquer à la méchanceté aussi . En primaire , mon surnom était « poison » …… mais j’ ai évolué depuis
De toute façon, qu’est-ce qui n’est pas névrotique dans nos constructions de l’âme…
Haha c’est rigolo, j’étais une peste, petite fille. Enfin non, mais je n’avais pas appris à enrober mes moqueries de tendresse. Et maintenant ça dépend, je suis le miroir de ce qu’on m’envoie, souvent.
Mais c’est une chouette qualité, la gentillesse, et on en manque tellement cruellement qu’heureusement qu’il y en a pour l’être beaucoup (jamais trop).
Je crois aussi beaucoup en la symétrie des attentions, et je penche plus vers cette attitude au quotidien. Mais si je me dis gentil, je ne suis ni flagorneur, ni hypocrite, et ma sincérité est parfois blessante car « j’enrobe » peu également.
Je fais aussi parti de cette « caste » de gentil. Ce qui m’a toujours étonné (et agacé !), c’est que souvent, pour beaucoup, la gentillesse est considérée comme un défaut ! Je remercie quand même le psy qui m’a appris à dire « non » ; il m’a appris que l’on pouvait rester un gentil même en disant non :-)
Ah moi, j’ai appris tout seul, et c’est vrai que c’est très utile et indispensable !!