Je lis beaucoup d’articles ou de statuts (Madjid ou Lestrade pour des exemples publiés et accessibles par tous) qui évoquent des parallèles entre l’épidémie de Covid-19 que l’on vit actuellement, et celle du VIH que l’on vit aussi actuellement, mais depuis presque 40 ans (et déjà ça, c’est pas pareil ^^). Je parle bien de parallèles et pas vraiment de comparaisons, parce que ce n’est vraiment pas possible sans dire de grosses bêtises de trop rapprocher les deux. Mais ce n’est pas pour rien que ça remue ainsi les méninges et les plumes de mes keupines militantes.
Et puis il y a le Roncier qui écrit un article superbe sur le sujet, lui que je lis depuis tant d’années, et dont je suis de loin les pérégrinations. Et que j’aime tant (et qui doit être mon creuche depuis 2004, c’est fou). Donc la directive est simple, allez donc lire son très bon post !
En évoquant les deux épidémies, il parle surtout de celle qui l’a lui touché directement, et c’est toujours ultra-émouvant de lire ce qu’il a pu ressentir à l’époque, on a sans doute un peu oublié tout ça.
C’est si loin. Je ne pensais pas, qu’un jour, ces moments deviendraient flous, que leur tranchant s’émousserait jusqu’à ce que je puisse les regarder presque sans pleurer. C’était en l’an 2000, seulement quatre ans après mon bac, quatre ans après les «nouveaux» traitements en multithérapies. Je pensais que j’allais mourir en quatre ans, aussi, parce que quelqu’un connaissait quelqu’un qui. Parce que les pédés restaient jeunes pour toujours, parce qu’ils mouraient encore du sida. J’avais 22 ans et je voulais qu’on m’aime.
Cela fait quelques temps maintenant qu’on scande à tue-tête que les personnes séropositives sous traitement ne transmettent pas le virus. C’est aussi simple que cela, et c’est tout de même génial. Mais je ne mesurais pas à quel point cela pouvait ôter une épée de Damoclès pour certains, et pourtant ça tombe sous le sens en le lisant.
Depuis plus de 10 ans officiellement, on sait que les personnes qui prennent un traitement efficace, donc avec une charge virale contrôlée, ne transmettent pas le VIH. Du tout. Je sais pas ce qui vous pouvez comprendre ce que c’est, l’impact que ça a, quand on est séropo, l’idée de savoir, avec certitude, que vous n’êtes plus un danger pour vos amours. Pour moi, c’est mieux que d’être guéri. C’est presque plus important que d’être en bonne santé. La plupart des personnes vivant avec le VIH en ont entendu parler, parfois —pas toujours— leur médecin leur a confirmé l’information, mais souvent, elles ne l’ont pas intégrée. Et parfois, quand elles l’ont intégrée, ce sont leur partenaires réguliers qui ne l’acceptent pas. Un des plus grand progrès, selon moi, pour les séropos, et il est encore inaccessible pour les personnes concernées.
Je sais que le VIH est loin d’être de l’histoire ancienne, surtout en considérant son impact dans certains pays du monde, ou simplement dans certaines franges de notre société précaires dans beaucoup de domaines dont celui-ci. Mais c’est cool de se dire qu’on a au moins ici une certaine maîtrise du virus, des traitements, et même depuis récemment d’une méthode prophylactique qui commence à faire ses preuves (je parle de la PrEP bien sûr). Après est-ce que cela ne ralentit pas les recherches en vue d’un remède ou d’un vaccin plus « final » ? Peut-être bien, et la vigilance ne doit jamais être diminuée à ce niveau. Mais célébrons aussi, sans fanfare comme le dit le Roncier, ce dénouement (tardif, mais là).
Depuis quelques temps, je n’arrive pas à obtenir de chiffres précis sur les morts du sida dans les dernières années en France. Quelques centaines ? Moins ? Qu’est-ce qui qualifie une mort sida en 2020 ? Peut-être qu’on va se réveiller dans quelques années pour se rendre compte que personne n’est mort du sida en France depuis un moment. Pas de fanfare, pas de parade, juste nos humbles vies comme les discrètes et néanmoins glorieuses victoires qu’elles sont.