J’ai adoré cet article de The Verge qui explique la fin des réseaux sociaux tels qu’on a pu les connaître peu à peu depuis 2007. Sur une bonne quinzaine d’années donc, on a vu la croissance de ces services plus ou moins gratuits (puisqu’on ne fait que vendre son âme lorsqu’un service est gratuit en apparence sur les Internets), fonctionnant sur de la pub ou de la vente de données (c’est à peu près la même finalité, modulo le renversement d’élections…), mais globalement sur une philosophie d’ouverture relative (sous forme de plateformes collaboratives permettant de récupérer ou d’exposer ses propres données à des services tiers tout aussi peu scrupuleux). C’est-à-dire qu’on est ouvert tant qu’on est petit, et dès qu’on a conquis suffisamment d’audience, et qu’on la considère captive, alors on peut se refermer et faire mourir les entités rendues dépendantes, des plus petits concurrents ou encore rendre payant ce qu’on considère à présent comme un service qui doit trouver son modèle économique en ponctionnant une chaîne de valeur ainsi constituée.
On l’a vu chez Facebook ou Twitter qui ont ouvert des API et les ont fermé, et encore plus aujourd’hui avec l’éclosion des Intelligences Artificielles (IA) qui se nourrissent (et « apprennent ») en glanant les informations librement récupérables sur les Internets (comme d’ailleurs sur ce blog, lui-même ouvert aux quatre vents). En effet, ces IA proposent des services payants qui commencent sérieusement à intéresser l’industrie, et donc les plateformes fournissant ces contenus (les nôtres, cédés gratuitement à la vente implicite de notre âme lors de l’inscription) d’apprentissage pensent qu’ils vont se refaire grâce à ce business. Mais le truc c’est que si tu te refermes, tu déséquilibres aussi plus ou moins le système puisque les utilisateurs qui génèrent ces contenus sont moins intéressés.
Bref, il y a clairement des évolutions en cours, et d’autant plus lorsqu’on voit l’abandon assez grandiose de Facebook, la polarisation hystérique et dangereuse de Twitter, et donc récemment un revirement de Reddit qui verrait cette plateforme se transformer radicalement. Il existe bien des solutions de plus en plus niches qui proposent des communautés très locales et qui fonctionnent (typiquement Discord), mais clairement je ne vois pas comment ils vont exploiter un truc aussi dispersés et bordéliques.
J’avais beaucoup d’espoir dans Mastodon qui est un clone de Twitter mais qui repose sur des organisations décentralisées et une plateforme open-source qui permet une intercommunication assez efficace. Mais c’est trop « geek » et je sens bien que ça ne prend pas vraiment. J’aime beaucoup car cela me permet de nouveau de lire et d’interagir avec des tas de gens très différents. D’autres pays, d’autres cultures, super gauchistes et woke à mort, c’est le bonheur, et évidemment très queer. ME LIKEY!!!
Et voilà que tout récemment Instagram a sorti son propre clone de Twitter qui s’appelle Threads. Et Threads arrive en chevalier blanc des Internets en voulant promouvoir son interconnexion avec le même protocole qui sous-tend la syndication des contenus des serveurs de type Mastodon. Cela pourrait être vu comme une bonne nouvelle, car cela offrirait un « partenaire » de choix pour développer Mastodon. Mais en réalité c’est sans doute plutôt une stratégie pour mieux se développer tout en permettant à terme de tuer ces protocoles ouverts. Et l’application Threads qui arrive en effet avec les moyens, et le contrat méphitique de cession implicite de son âme, d’Instagram, et donc Facebook, apparaît déjà comme un super moyen de capter des gens qui voudraient se mettre à suivre des comptes Mastodon (qui lui fournit des applications et contenus complètement libres et sans traque ni aspiration de données, et donc il est cool de donner quelques euros en échange à celui qui vous fournit votre instance. Je donne par exemple 2 euros par mois au choupi qui entretient l’instance sur laquelle je me suis inscrit super-gay.co, c’était tellement pour moi hein, on doit être une soixantaine ainsi « chez lui »).
Il y a eu une grosse levée de boucliers chez les mastodontes qui ont décidé par avance de bannir toute relation avec Threads. Mais ironie du sort, Threads qui devait redouter un démarrage difficile se retrouve avec une croissance folle et déjà 100 millions d’utilisateurs en trois semaines. Inutile de dire qu’ils n’ont plus rien à battre des communautés de Mastodon et consorts. Mein gott, quel est ce monde ?
Quant aux blogs, ils pourraient tellement revenir, et ce serait une telle solution géniale si tout un chacun s’en emparait. Tout est déjà là. Les communautés, les productions de contenus, les plateformes open-source plus ou moins autohébergées, les systèmes de syndication de contenus etc. C’est déjà l’équivalent de Facebook, Twitter et consorts, mais non le truc est irrémédiablement terminé et enterré. C’est fou.
Peut-être pour le prochain confinement.
Je comprends les espoirs (un peu déçus) de Mastodon et même, probablement, de Threads. Mais au final, jusqu’à présent en tout cas, j’ai tellement la flemme de quitter Twitter et de tout recommencer ailleurs…
Sur le coup je pense que Threads est un bon clone, mais qui aura sans doute les mêmes travers et rapidement sans doute beaucoup trop de pubs (comme sur IG ou FB). Les réseaux IG et Tw sont vraiment proches chez moi en tout cas. Mais oui chaque support est l’occasion d’une communauté particulière qui se tisse peu à peu, et qu’on perd potentiellement lorsque ça s’arrête. Mais j’ai tellement connu de cycle complet de vie/mort de ces artefacts que je me dis juste qu’on ira reconstruire ailleurs, et que ces trucs là sont juste temporaires. On finit toujours par se retrouver ailleurs.
Perso je ne pense pas quitter, mais juste ne plus utiliser: désinstaller de mon portable (je n’ai déjà plus FB sur mon portable depuis un moment).
Les blogs forever.
Moi je ne jure ou ne présage de rien, je suis partout.