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Pectus est quod disertos facit. ∼ Pédéblogueur depuis 2003 (178 av LLM).

De natura rerum

Je voulais partager cet excellent épisode de Radiolab qui continue à produire un superbe podcast depuis plus de vingt ans maintenant. A présent c’est Latif Nasser et Lulu Miller qui présentent le show, et là en l’occurrence c’est un épisode qui se concentre sur cette dernière. J’ai trouvé très intéressant, comme d’habitude, cette enquête mais c’est l’introspection de Lulu qui est géniale et qui rend cette écoute particulièrement passionnante.

C’est une histoire de mouettes pour tout vous dire, mais des mouettes lesbiennes californiennes (évidemment) dans les années 70 !! C’est pas génial ça ? Lulu explique comment cette découverte unique a été une sorte de choc scientifique et social mondial à l’époque, et le scientifique raconte son étonnement lorsqu’il a été submergé de demandes d’interviews du monde entier. Il avait juste découvert avec sa collègue qu’il y avait des comportements clairement homosexuels chez des mouettes femelles qui se mettaient en couple, simulaient la copulation, et élevaient des bébés orphelins ensemble. Apparemment ce fut très difficile de publier ce papier à cause de son sujet sulfureux. Et comme nous étions dans une période d’homophobie ordinaire où on évoquait l’aspect « contre-nature » de l’homosexualité, tout ce qui pouvait prouver que ces comportements étaient en réalité légion chez les animaux serait un contre-argument de choix. Et là ça a ouvert apparemment un immense boulevard.

Car non seulement les mouettes, mais cette histoire a aussi apparemment désinhibé tout un tas de scientifiques qui se sont mis à étudier tout un tas de comportements sexuels « déviants » dans la nature, y compris des lézards (uniquement femelles) qui se reproduisent par une sorte de parthénogénèse alambiquée qui ne réduit pas autant que cela la diversité génétique du groupe (ce ne sont pas de simples clones). Et donc c’est plutôt un chouette truc pour nous les déviants humains. ^^

Mais là où c’est très drôle, c’est qu’aujourd’hui il n’y a plus de mouettes lesbiennes sur cette île californienne !! Les scientifiques ont découvert que l’homosexualité des oiseaux était en réalité déclenchée par un réflexe darwinien dans une période terrible où le DDT était dramatiquement utilisé aux USA, et condamnait des générations entières d’oiseaux marins. Les mouettes mâles étaient tellement touchées, que les femelles devenaient lesbiennes pour perpétuer l’espèce. Hu hu hu. (Il faut écouter le podcast pour comprendre plus précisément ces aspect.)

Mais ce qui m’a intéressé dans l’épisode, c’est que Lulu Miller elle-même s’est retrouvée très déçue par ces mouettes qui n’étaient plus lesbiennes, jusqu’à même pousser le scientifique dans ses retranchements. Et son attitude même la pousse à s’interroger sur la manière dont elle-même avait besoin de prouver l’aspect « naturel » de sa propre homosexualité.

Elle se retrouve à interviewer son épouse, et c’est assez génial d’entendre cette dernière qui lui explique qu’en effet, elle n’a pas besoin de prouver que tous les animaux sont queers pour justifier leur couple.

J’ai beaucoup aimé cela car on passe tous, je crois, par cette phase qui consiste à nous rassurer en nous prouvant qu’on n’est pas des monstruosités, mais que c’est naturel ou normal. En revanche, c’est un truc qui m’est complètement passé, et aujourd’hui même si l’homosexualité était une déviance parfaitement et singulièrement humaine, eh bien ça ne me dérangerait absolument pas. Rien à battre ! Et surtout si on doit débattre de ce qui est « naturel » ou pas, on vit dans un monde tellement artificiel et totalement façonné par l’homme que ces arguments s’écroulent très très vite.

  • J’aime bien ton dernier paragraphe mais justement, les « conservateurs » qui nous jugent « contre-nature » n’aiment pas l’artificialisation du monde, opposée à une vie et un ordre « naturels ». Ils sont contre la PMA et les OGM, etc.
    Si j’aime les mecs, personne ne m’a « manipulé » pour un tel résultat !
    Je suis naturellement pédé :sourire:
    Mais je ne crois pas que les arguments s’écroulent vite et entre l’inné et l’acquis, l’acceptation de notre « déviance » passe aussi, vis-à-vis d’une partie de la population (par ex certains pays en Afrique sub-saharienne aujourd’hui), par la « démonstration » de son caractère inné.
    Ce que potentiellement, les comportements queer des animaux pourraient appuyer…
    (désolé pour les multiples «  » mais j’hésitais sur l’emploi et le sens des mots :clindoeil: )

    • Vraiment je pourrais écrire tout ce que tu as dit là, car ce que j’écrivais moi-même n’est valable qu’après mon propre cheminement et dans un contexte (en sécurité, sans oppression) bien précis. Donc oui oui, ce n’est pas du tout une assertion universelle. :gene:

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