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Pectus est quod disertos facit. ∼ Pédéblogueur depuis 2003 (178 av LLM).

Paycheck

Voilà un recueil de nouvelles de Philip K. Dick que je ne connaissais pas, mais le titre me rappelait bien une des dernières adaptations cinématographiques d’un récit du maître de la SF. On ne peut pas dire que ce recueil soit une sélection des meilleures choses écrites par K. Dick, c’est en fait assez inégal. Le style et le niveau même littéraire est parfois un peu limite à mon goût, et ces récits ont tous été publiés de 1953 à 1974 dans diverses revues de SF. « Paycheck » est en fait une nouvelle vraiment banale et classique dans le veine SF des années 50 aux US. Je ne sais pas ce que le film a donné, je suis maintenant curieux de voir ça.

K. Dick n’est pas tant un écrivain reconnu pour son style, mais bien pour ses histoires et ses idées. Et là encore, il fait fort. Même si l’ensemble me parait mineur, du coup j’ai été très sensible au fond et on se demande bien comment un homme pouvait-il avoir de pareilles idées dans les années 50 (les buvards de LSD devaient l’aider me direz-vous… certes certes !). Comme ce sont des nouvelles, on a l’impression que l’auteur a eu une idée, un concept simple d’une intrigue fantastique, et qu’il a jeté cela sur le papier sans bien y mettre les formes, mais simplement pour donner vie à son idée, à sa vision créatrice. Aussi chaque histoire est basée sur une approche linéaire soit psychologique, sociale, politique, médicale vue à travers la lorgnette à voir dans le futur de K. Dick. Et certaines intrigues sont très habiles et troublantes. Comme d’habitude, l’écrivain nous intime à remettre en question notre environnement tel qu’on le perçoit, à considérer que le réel n’est que la surface des choses, et qu’on ne voit ce qu’on nous apprend à voir avec des préceptes humains et donc forcément peu fiables ou faux.

Il est toujours marrant de lire dans ces récits de SF de moins en moins contemporains (mes auteurs favoris restant ces auteurs américains des années 50-60 tels Asimov ou D. Simak), que les auteurs arrivent à écrire sur le futur en en faisant des univers tout aussi surannés et obsolètes pour nous. Et je suppose que dans un futur proche, les auteurs d’aujourd’hui seront tout aussi désuets avec leur monde de demain qui, pourtant, nous parait assez réaliste ou cohérent. On trouve donc dans ces nouvelles certains « anachronismes » du futur qui est particulièrement symptomatique de la génération des auteurs qui ne mesuraient pas vraiment l’importance de l’ordinateur, même si la « machine » en tant que telle est présente. K. Dick continue a imaginer les grandes civilisations du futur comme l’affrontement entre les USA et l’Union Soviétique, cela reste un leitmotiv de base chez lui, et manifestement une immense source de frayeur. On ne se détache pas non plus de l’écriture manuscrite et du papier, ainsi pour communiquer avec une machine, on écrit sur une feuille, et la machine lit cela pour agir. Ses robots restent aussi des êtres mécaniques rudimentaires et caricaturaux. Par contre, il a un talent dingue pour inventer des machines et des néologismes très fins et intelligents.

La dernière nouvelle a été écrite en 1974, et je l’ai trouvée particulièrement intéressante. « Les pré-personnes » évoque ce qui devait être aussi aux US l’époque un sujet d’actualité brûlant : l’avortement. K. Dick démontre donc plus ou moins sa farouche opposition à cela dans une nouvelle en forme de brûlot politique qui sent aussi un peu la misogynie. Il explique comment on a basé la loi sur l’avortement en fonction de la notion de personne du foetus, et que le fait de dire que l’on pouvait se débarrasser d’un enfant tant qu’il n’était pas vraiment un être est inepte. Ainsi dans son histoire, l’avortement a ainsi politiquement progressé jusqu’à devenir une loi qui stipule qu’une personne n’a une âme que lorsqu’elle commence à comprendre les principes de base d’algèbre, et la loi fixe cette limite à 12 ans. Ainsi en deçà, les parents peuvent avorter de leurs enfants, ce qui est une pratique courante pour se débarrasser de gamins rébarbatifs. Des voitures de « fourrière » circule dans la ville à la recherche des enfants errants, et ils leur vident l’air de leur poumons, si au bout d’un mois ils n’ont pas été adoptés, ou récupérés par leur parents.

Il est dans cette nouvelle, et à propos de l’avortement, horriblement démagogue et réactionnaire, et j’abhorre complètement les thèses qu’ils déroulent. Mais il n’en reste pas moins, que cette vision purement politique est tout à fait sagace et pertinente. Car K. Dick pose une intrigue plus nuancée qu’un débat anti-avortement contemporain. Il explique une dérive d’un appareillage législatif qu’il réprouve, et il justifie cette pratique par une surpopulation de la planète et un moyen de limiter la démographie, mais aussi par une concurrence générationnelle plutôt que ce qu’on appelle le « conflit des générations ». Et là du coup, on peut penser au livre de Maïa Mazaurette. Le héros de la nouvelle explique :

Que sont devenues les vertus maternelles ? se demanda-t-il. Celles qui avaient cours au temps où les mères protégeaient en premier lieu ce qui était petit, faible et sans défense ?

C’est parce que la concurrence règne en maître dans notre société, décréta-t-il. Avec la survie du plus fort. Non pas du plus apte, mais de celui qui détient le pouvoir. Et qui n’est pas disposé à le céder à la génération suivante : c’est le combat des anciens, puissants et mauvais, contre les nouveaux venus, doux et impuissants.

Paycheck - Philip K. Dick

PS : J’ai mis un peu plus longtemps à finir ce post, car une facheuse s’est assoupie sur mes genoux, et en s’étirant a quelque peu empiété sur mon territoire.

Pfff je peux plus écrire

  • Non, pitié, laisse tomber le film. Vu la semaine passée. Comme trop souvent, la première demi-heure est assez excitante, très prometteuse. La suite vire au pathétique. Ben Affleck est vraiment l’un des pires acteurs du moment, une asperge joue mieux. Quant à Uma Thurman, c’est à se demander ce qu’elle fait là, la pauvre. Non, vraiment, oublie le film.

  • J’avais pas mal aimé le film, sorti il y a qques mois, un peu comme tous ces films inspirés des idées originales de K Dick (minority report, planète hurlante, total recall) et bien rythmés.
    Le coup de l’enveloppe où j’ai mis tous les indices avant d’etre amnésique, ct pas mal du tout du tout …. pareil dans l’intrigue du livre ?
    C Vrai qu’en général la SF est très mauvaise anticipatrice , rien que voir à quoi ressemblaient les écrans d’ordinnateurs du XXIIIème siècle dans les films de SF jusque au début années 90 …

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